Soldat au 48e RI, Jean-Louis est blessé et évacué du front trois fois entre la fin août 1914 et mai 1917, avant d’être fait prisonnier le 2 juin 1918 et interné en Allemagne.
Démobilisé le 5 octobre 1919 et affecté spécial des chemins de fer de campagne, Jean-Louis est revenu de la guerre très perturbé mentalement. Comme tant d’autres, choqué par ce qu’il a vu et vécu dans l’enfer des combats, il passera plusieurs mois en asile d’aliénés.
Il décède à Kerglaz, Plogonnec, chez son frère en 1934.
Jean-Louis Galiot naît le 14 novembre 1892 à Kerhervan, Plogonnec. Il est le second fils de Jean, charpentier et de Anne Marie Moysan, qui ont aussi 3 filles et 2 autres fils.
Avant la guerre
Cheveux châtains foncés et yeux marrons, il est de taille moyenne (1,62cm) et sait lire et écrire.
Engagé volontaire pour 5 ans à la mairie de Brest le 13 décembre 1911 au 2e régiment d’infanterie coloniale, il est réformé le 20 décembre 1912. Classé apte par le Conseil de révision du 6 novembre 1913, il est rappelé à l’activité le 28 novembre 1913 au 48e RI de Guingamp.
Pendant la guerre
Jean-Louis part aux armées le 8 août avec le 48e RI, qui dès le 10, marche vers l’ennemi depuis Vouziers, dans les Ardennes, en direction de Namur, en Belgique.
Le 22 août, journée si meurtrière pour l’armée française, le 48e RI attaque à Ham-sur-Sambre et Arsimont, mais le régiment est décimé par les tirs ennemis, et se replie. Jean-Louis survit à cette journée désastreuse.
Comme l’ensemble de l’armée française, le 48e RI bat en retraite.
Le 29 août 1914 au matin, il atteint Lemé, dans l’Aisne. L’ennemi est signalé sur la droite. Le 48e reçoit l’ordre d’attaquer pour arrêter la progression de l’ennemi. Les bataillons se déploient et le combat s’engage mais les munitions viennent rapidement à manquer, et le mouvement de retraite s’accentue. 500 hommes sont tués ou blessés ce jour-là, parmi eux Jean-Louis blessé aux deux fesses.
Jean-Louis est évacué et hospitalisé, éloigné du front pendant plus d’un an, jusqu’à fin septembre 1915. Pas d’informations à ce jour sur son hospitalisation ou sa période de convalescence.
Il regagne le dépôt du 48e RI à Guingamp le 8 juin 1915 et rejoint le front en renfort du 71e RI de St-Brieuc en Argonne le 30 septembre 1915. Il repasse au 48e le 15 octobre (le 71e et le 48e constituent la 37e brigade de la 19e division d’infanterie). Les régiments sont dans le secteur du Four-de-Paris et de La Harazée, dans le secteur même où son frère Jérôme a trouvé la mort quelques mois auparavant.
Le régiment reste en Argonne jusqu’à janvier 1916, puis gagne le secteur de Verdun en mars 1916, d’abord dans les secteurs d’Avocourt-Chattancourt-Le Mort Homme à l’ouest de Verdun.
Après un court repos, début août, le 8 août le 48e remonte en 1ère ligne dans le secteur de l’ouvrage de Thiaumont. Le 11 août 1916, le 1er et le 3e bataillon sont chargés d’attaquer l’ouvrage de Thiaumont, alors que l’ennemi, qui occupe l’abri bétonné sur la crête de Thiaumont, balaie avec ses mitrailleuses tout le champ devant lui. L’attaque est déclenchée en fin de journée. Au prix de nombreuses pertes et sous un bombardement intense, une centaine de mètres sont gagnés et conservés.
Journée du 11 août 1916. Témoignage de Charles HENRY, lieutenant au 48e R.I. (http://www.lesfrancaisaverdun-1916.fr/fortifications-thiaumont.htm)
» Nous gagnons, entonnoir par entonnoir, les emplacements de 1e ligne, situés à peine à 200 mètres de l’ouvrage de Thiaumont.
La matinée est tranquille : pas un obus, pas un mouvement ; c’est le calme qui précède la tempête, car nous savons que nous allons attaquer.
A 16 heures, nos canons commencent à bombarder l’ouvrage que nous devrons enlever 2 heures plus tard. La réplique ne se fait pas attendre, bientôt les obus ennemis pleuvent comme grêle autour de nous. Plusieurs de mes hommes sont blessés, enterrés par les 210.
Les cadavres retournés une fois de plus par les obus dégagent une odeur infecte. Les éclatements simultanés, les sifflements de 75 et les hurlements des marmites agissent d’une telle façon sur nos pauvres cervelles que nous croyons qu’elles vont éclater. Et toujours de nouvelles victimes qui crient au secours.
Cependant l’heure H approche.
Plus que 30 minutes, 20, 10, l’aiguille de ma montre avance constamment, rien ne peut l’arrêter. Mon oeil ne la quitte plus et je compte… la poche bourrée de cartouches, le fusil d’un mort à la main, je me redresse lentement sur les genoux… 17 h 58, 17 h 59… 18 heures, j’ouvre la bouche pour crier : « En avant ! », quand un éclatement rouge m’aveugle, me renverse sur le sol. J’ai le genou droit transpercé, une seconde blessure au ventre et une troisième à la joue.
Près de moi, d’autres blessés, des morts…«
Jean-Louis fait partie des soldats « blessés, enterrés par les 210« . Il est évacué, soigné pour contusions. Le 3e bataillon perd ce jour-là plus de 200 hommes.
On note que seules les blessures physiques sont mentionnées sur la fiche matricule des soldats, nulle évocation de ce que les Britanniques appellent le « shell shock« , un syndrome du stress post-traumatique dont sera victime Jean-Louis.
Jean-Louis regagne le front, toujours avec le 48e RI, le 29 septembre 1916, en Champagne dans le secteur calme d’Auberive, puis au camp de Mailly en janvier-février 1917. Le 15 février, le régiment quitte le camp de Mailly et marche vers la Somme et est dirigé, le 25 avril 1917, sur le secteur de Moronvilliers, sur les pentes ouest du Mont-Cornillet.
Le 4 mai 1917, le 1er et le 2e bataillon reprennent l’attaque du 71e RI avec pour objectif d’atteindre le sommet. Mais le feu nourri de mitrailleuses fixes et mobiles groupées en batterie arrête l’élan des assauts. Le régiment perd 8 officiers et environ 850 hommes. Jean-Louis, présentant une plaie à la main gauche, est évacué.
Le 2 juin 1917, il regagne le 48e RI à ses cantonnements au nord de Bar-le-Duc. Après quelques semaines de repos et d’instruction, le 48e RI gagne le secteur des Éparges où explosions de mines et forts bombardements se succèdent. Le 22 août, le régiment revient au repos dans la région de Bar-le-Duc.
C’est à cette période que Jean-Louis obtient une citation à l’ordre du régiment le 1er septembre 1917 « Bon soldat ayant toujours accompli son devoir » – Croix de guerre avec étoile de bronze.
Le 48e RI est rappelé précipitamment le 10 septembre pour prêter main-forte sur la côte 344 qui recevait un assaut allemand. « On peut difficilement imaginer ce que furent ces 18 jours sur ce terrain de Verdun, où les trous d’obus sont toujours remplis d’eau, où l’odeur cadavérique se mêlait à celle de l’ypérite » peut-on lire dans l’Historique régimentaire.
Le 8 octobre 1917, il regagne les Hauts de Meuse, à proximité des Éparges que la 19e division occupe pendant 5 mois, jusqu’en mars 1918, entre travaux d’aménagement et coups de main.
En mars 1918, les Allemands enfoncent le front de la Somme. Le 48e est transporté par camion jusqu’à Choisy-au-Bac dans l’Oise. Pendant trois mois et demi le régiment combat sans répit dans cette région marécageuse comprise entre l’Oise, l’Aisne et l’Ailette. Du 30 mai au 2 juin, les Allemands enfoncent le front. Les lignes craquent de tous les côtés malgré les combats et les tentatives de contre-attaques. Le 1er juin 1918, menacé d’encerclement, le 48e RI doit se replier d’urgence. Ce repli est rendu particulièrement difficile, l’aviation ennemie est très active, l’artillerie aussi. L’ennemi parvient à séparer les unités du 48e RI. Vers 13 heures, le régiment est en ligne sur les hauteurs d’Autrèches. Ce jour, 148 soldats sont portés disparus et 23 le jour suivant. Parmi eux, Jean-Louis.
Jean-Louis sera interné en Allemagne du 3 juin au 5 décembre 1918. A ce jour, pas d’informations sur son lieu d’internement.
Il regagne la France le 6 décembre 1918 et passe au 118e RI le 8 janvier 1919.
Démobilisé le 5 octobre 1919, Jean Louis est affecté spécial des chemins de fer de campagne comme manoeuvre à Auray jusqu’en 1922. D’après sa fiche matricule, en 1923, il est à Tours. Il sera ensuite interné dans un asile d’aliéné. Réformé définitivement en 1931 pour « atteint d’alcoolisme, avec idées de persécution, débilité mentale voisine de l’imbécilité sous-jacente », il meurt à Kerglaz chez son frère en 1934. Triste destin que celui de ces hommes broyés par la guerre...
Généalogie Galiot de père en fille
Jacques Galiot (1764-1835) | |
Jean Galiot (1798-1866) | |
Jean-Marie Galiot (1824-1886) | |
Jean Galiot (1860-?) | |
Anna Galiot (1899-1991) | Jérome et Jean-Louis sont les frères aînés d'Anna |